La Casa de Papel
Apparu en toute discrétion sur Netflix en novembre dernier, « La Casa de Papel » s’est imposée ces dernières semaines comme la série du moment. Créée par Alex Pina, cette série de braquage fera le bonheur de tous les adeptes de binge watching tant elle tient le téléspectateur en haleine par une mise en scène bien huilée. Une fois commencée, il est presque impossible de s’en détacher.
Avec certaines similitudes avec « Ocean’s Eleven » de Steven Soderbergh, la série nous embarque dans ce qui s’apparente au braquage du siècle, huit malfrats qui n’ont plus rien à perdre vont être embarqué par “Le professeur” dans un plan machiavélique visant à infiltrer la Fabrique nationale de la monnaie et du timbre et d’y faire imprimer 2,4 milliards d’euros, le tout sans verser une goutte de sang, pas une mince à faire avec 67 otages dans les pattes.
Le sens du rythme
La plus grande force de « La Casa de Papel » réside dans son rythme. Contrairement à d’autres séries où l’on nous balance la sauce dès l’entame de la saison mais dont le soufflé retombe aussitôt, les showrunners nous imposent ici un rythme assez soutenu, ils parviennent à garder notre attention sans trop de fioriture.
La tension monte crescendo par l’utilisation de flashbacks qui nous permettent d’en apprendre un peu plus sur l’élaboration du plan, sur la personnalité de chaque protagoniste et des relations qui les unissent, jusqu’à atteindre le point d’orgues au terme des 13 premiers épisodes qui composent la saison 1.
Une psychologie fouillée
Sous leurs blases inspirés de nom de ville, qui n’est pas sans rappeler « Reservoir Dogs » de Tarantino, chacun des braqueurs ont leur propre histoire et une psychologie qui leur est propre. Le passé de chacun nous est dévoilé au compte goute durant toute la série, on nous apprend ce qui les a poussé à se mettre en marge de la société et à réaliser ce braquage, ce qui nous permet de nous identifier à eux tout en gardant une part de mystère.
Et pour contrebalancer le tout, la psychologie des autres protagonistes que sont d’une part les otages et d’autres part, les forces de l’ordre sont elles aussi évoquées et malgré le fait que ce soient eux les victimes ne les empêchent pas d’avoir également leur part d’ombre.
La personnalité de la négociatrice pour ne citer qu’elle est un des pions essentiels de l’intrigue, ses relations conjugale et familiales ont un rôle important dans le déroulement du scénario. On se prend vite d’affection pour ces personnages qui, en fin de compte, nous ressemblent.
Qui sont les héros ?
Dans ce genre cinématographique où les méchants sont les héros principaux, les forces de l’ordre sont souvent stigmatisée, voire diabolisée tant le côté anti-héro des braqueurs plaît aux téléspectateurs. Les policiers servent en général de faire-valoir dans ces œuvres, ils n’apportent pas de profondeur au scénario.
Ici par contre on s’identifie autant aux flics qu’aux braqueurs et il en va de même pour certains otages. Il nous est donc compliqué de savoir de quel côté de la balance on se situe, le bien et le mal sont sur un pied d‘égalité, ce qui rend la série encore plus attrayante.
Imbroglio et faux semblant
La relation entre les victimes et leurs agresseurs est un facteur important dans « La Casa de Papel ». Au-delà du célèbre Syndrome de Stockholmqui est évoqué à de nombreuses reprises, il arrive parfois que l’inverse se produise ce qui amène un renouvèlement du genre. Certaines situations sont assez cocasses, la fourberie des uns combinée à la naïveté des autres amène un certain dynamisme à la série.
Verdict
Malgré certains défauts comme le côté trop prévisible de certaines scènes et les cliffhangers pas toujours bien placés, « La Casa de Papel » parvient à marquer les esprits par sa réalisation. L’enchaînement des scènes est orchestré d’une main de maître, le rythme est soutenu tout au long de la saison, on ne n’ennuie pas deux minutes.
Le jeu d’acteur ne souffre lui d’aucune contestation, un casting qui tient la route avec en tête de gondole Úrsula Corbero qui est magistrale dans le rôle de Tokio, la narratrice des événements, Pedro Alonso incarne avec talent un chef de bande mégalomaniaque nommé Berlin tandis que Álvaro Morte interprète “Le professeur” avec beaucoup de sensibilité et de classe.
Enfin, comment ne pas parler de la mise en scène soignée et de la qualité visuelle dans son ensemble, les masques à l’effigie de Dali sont intriguant au possible, certains plans sont à couper le souffle
La notoriété soudaine de « La Casa de Papel » n’est pas usurpée, la série est très bien ficelée et tient en haleine du début à la fin. Les espagnols, déjà reconnus pour leur cinéma, n’ont rien à envier à leurs homologues d’outre-Atlantique avec une série d’un si bon niveau. Et pour les impatients, sachez que la saison 2 sera disponible dès le 6 avril sur Netflix.
Note: 7/10
Damien Monami – 27 février 2018