Critique « Mandibules » (2020) : Dupieux et la mouche du coffre
L’inclassable Quentin Dupieux revient avec « Mandibules », une comédie irrévérencieuse portée par le duo du Palmashow. Critique.
Car l’ouïe est inouïe.
Après l’avoir dirigé dans « Un homme idéal » en 2015, le réalisateur Yann Gozlan retrouve Pierre Niney et signe un thriller haletant sur fond de crash aérien et nous embarque dans l’envers du décor de l’aviation, au sein de la méconnue BEA, le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile.
Après avoir été pompier dans « Sauver ou Périr », l’acteur de 32 ans incarne ici un acousticien rigoureux chargé d’enquêter sur les circonstances de ce drame mystérieux, seul contre tous, entre certitudes et paranoïa. Récompensé du prix du public au Festival du film d’Angoulême, « Boite noire » s’impose comme une des bonnes surprises de cette rentrée cinématographique, reste à voir s’il vaut le détour… ou plutôt le décollage.
Synopsis :
Que s’est-il passé à bord du vol Dubaï-Paris avant son crash dans le massif alpin ? Technicien au BEA, autorité responsable des enquêtes de sécurité dans l’aviation civile, Mathieu Vasseur est propulsé enquêteur en chef sur une catastrophe aérienne sans précédent. Erreur de pilotage ? Défaillance technique ? Acte terroriste ? L’analyse minutieuse des boîtes noires va pousser Mathieu à mener en secret sa propre investigation. Il ignore encore jusqu’où va le mener sa quête de vérité.
Souvent dénigré, notamment pour ses trop nombreuses comédies potaches, le cinéma français regorge pourtant de pépites. Depuis quelques années, un certain renouveau s’opère via des productions qui ne manquent pas d’audace ; dans leur sillage une « nouvelle » génération d’acteurs étincelantes s’est imposée. Figure de proue de cette dernière, Pierre Niney ne cesse de taper juste et impressionne à chacune de ses apparitions.
Dans « Boite Noire », il offre une composition de haut-vol avec ce personnage complexe – à la fois pragmatique et impétueux – qui s’embarque dans une enquête sinueuse dont il ne peut sortir indemne. On plonge tête la première dans le délire parano de cet homme obstiné et plein de contradictions rendu crédible par la puissance du jeu d’un Niney tout simplement phénoménal.
Cette sensation de connexion avec le personnage est renforcée par l’intimité sonore que le spectateur partage avec ce dernier tout au long du récit. En cela, le travail sur le son est un des atouts majeurs du film de Yann Gozlan : se dévoile à nos oreilles un curieux mélange entre les sons analysés par le technicien et la composition musicale dont la parfaite maitrise fait monter la tension crescendo au fil de l’investigation.
Un climat anxiogène qui n’est pas sans rappeler « Le Chant du loup » s’impose alors, bien aidé par la mise en scène certes classique mais qui use de plans serrés, ce qui a pour effet d’accentuer encore d’avantage cette sensation, cette angoisse de tous les instants. Le réalisateur installe un climat oppressant où la vérité est tapie dans l’ombre, cachée dans ces interminables pistes audio.
Ajoutez à cela un réalisme glaçant et une précision d’orfèvre et vous obtenez avec « Boite Noire » un thriller déroutant à l’efficacité cynique. Dans la lignée des polars teintés de paranoïa des années 70, le métrage se mue par son propos en objecteur de conscience : il interroge sur le rapport entre l’homme et la machine alors que les intelligences artificielles prennent chaque jour plus d’importance dans le monde du travail.
Dans le sillage de l’excellent Pierre Niney, les acteurs qui l’accompagnent se distinguent par leur justesse. Lou de Laâge, André Dussolier et Sébastien Pouderoux donnent vie à des personnages secondaire qui sont tout sauf manichéens et dont les aspirations sèment le trouble dans l’esprit des spectateurs qui, à l’instar du protagoniste, finissent par douter de tout.
Avec « Boite Noire », le réalisateur Yann Gozlan signe un thriller implacable et immersif. En dépit de quelques longueurs, il dépeint une enquête angoissante et chaotique qui fait vaciller son héros dans un cercle infernal, une haletante course contre la montre qui se fait de plus en plus oppressante au fil de ses investigations jusqu’à un final d’anthologie.
Porté par un Pierre Niney magistral, « Boîte Noire » est un bouillon de puissance et de paranoïa qui mise sur sa mise en scène léchée et sur la trame narrative complexe de ses personnages pour accentuer la sensation de précarité d’un récit qui met nos certitudes à rude épreuve. Un polar noir et schizophrénique dont les réponses sont à chercher tout au fond de ces boîtes noires – qui au fait sont… orange !
Un vol en première classe.
Damien Monami – Le 4 octobre 2021
Sources Photos :
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