Un chasseur sachant tchatcher !

Chien de la casse 

Présenté et primé au Festival Premiers Plans d’Angers, « Chien de la casse », est le premier film signé Jean-Baptiste Durand, qui offre à ses jeunes comédiens des textes subtils, doux-amers sur l’amitié entre deux potes sur fond de ruralité.

Notre critique vous dit tout d’un premier film aussi sec que les Causses !

Critique « Chien de la casse » (2023) : Un chasseur sachant tchather… ! - ScreenTune
© 2023 O'Brother Production & Versus Production

Synopsis :

Le Pouget, petit village du sud de la France où les jours se suivent et se ressemblent pour Dog (Anthony Bajon) et Mirales (Raphaël Quenard), deux amis qui se fréquentent depuis leurs douze ans. Dog est plutôt silencieux, timide, introverti. Mirales est un trublion, fort en gueule et plutôt chambreur. Leur quotidien se résume à traîner sur la place du village, jouer à FIFA, promener le chien Malabar et à refaire le monde… Mais l’arrivée d’Elsa (Galatéa Bellugi), étudiante bretonne venue s’installer un temps au village, va bouleverser l’équilibre fragile de l’amitié entre les deux potes. Le temps des changements et des introspections est arrivé.

Soyons honnête avec nos lecteurs, nous ne connaissions pas cette expression argotique certes intrigante : chien de la casse qui, selon les cas, s’applique à un homme célibataire qui se conduit en amour comme un mort de faim ; à un individu se battant hargneusement alors qu’il n’y a plus rien à gagner ; ou encore à une personne qui vit à la marge, qui n’est pas intégrée. (En effet, dans cette expression argotique, le mot casse fait référence à une casse automobile, imaginée comme un grand bric-à-brac gardé par un chien.)

Critique « Chien de la casse » (2023) : Un chasseur sachant tchather… ! - ScreenTune
© 2023 O'Brother Production & Versus Production

A part la casse automobile, il y a un peu de tout dans l’histoire d’amitié douce-amère qui lie Dog et de Mirales. Le réalisateur offre une belle profondeur aux relations entre ses personnages et les expose habilement. Un petit village des Causses où les personnages semblent regarder le temps passer ; cependant ce ne sont pas des vieillards qui s’expriment mais des jeunes revenus de tout dont le discours sonne quelque part comme un appel à l’aide.

Jean-Baptiste Durand signe avec « Chien de la casse » un premier film aux thématiques subtiles sur une histoire d’amitié tumultueuse qui n’est pas sans rappeler celle des « Banshees of Inisherin » de Martin McDonagh (2022). Simple comparaison car la vision française de l’amitié est beaucoup plus brutale et réaliste que le film irlandais. 

Durand filme avec amour et une certaine poésie la ruralité de ce petit village de l’Hérault. On pourrait comparer ce premier film, toute proportion gardée, au cinéma néo-réaliste italien avec des films tels que « Le voleur de bicyclette » en 1948, « Riz amer » en 1949, « Chronique d’un amour » en 1950.

Critique « Chien de la casse » (2023) : Un chasseur sachant tchather… ! - ScreenTune
© 2023 O'Brother Production & Versus Production

Épuré et calibré, le film offre à ses thématiques du temps pour se développer et de grands espaces dans lesquels s’engouffre avec authenticité Raphaël Quenard (« Fragile », « Coupez ! », « Fumer fait tousser ») aux monologues inspirés et aux quelques punchlines bien senties. Il fait preuve d’une tchatche énorme qui stigmatise bien des malaises d’une jeunesse française sans boussole. Face à lui, Anthony Bajon (« La prière » en 2018, « Teddy » 2020, « Athena » en 2022) apporte une belle sensibilité à un rôle essentiellement fait de regards et de mots inexprimés quant à Galatéa Bellugi,(« La Fille d’Albino Rodrigue » en 2023) elle confère à Elsa la fraîcheur et l’enthousiasme nécessaire pour que Dog choisisse d’enfin se projeter et d’aimer. 

Prix du public au festival d’Angers 2023, ce premier film parfois drôle mais terriblement réaliste pose un vrai regard sur la jeunesse en milieu rural qui semble apporter un écho à ce que disait « La Haine » (en 1995 de Mathieu Kassovitz) des jeunes des cités.

NOTE :

0 /10

« Chien de la casse » surprend dans le paysage cinématographique français par ses thématiques, la ruralité, la solitude moderne mais aussi la peur d’évoluer… Les jeunes protagonistes du film sont indubitablement de grands talents en devenir même si celui de Raphaël Quenard, plus particulièrement, éclate ici au grand jour.

Pour autant le scénario n’est guère imposant, c’est donc la mise en scène, la photographie et les acteurs qui apportent au film une note au-dessus de la moyenne.

Gageons qu’on reparlera bientôt des acteurs et du réalisateur…

Yves Legrand – Le 14 juin  2023

Sources Photos : 

© 2023 – O’Brother  : http://www.obrother.be/chien-de-la-casse.html

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