Un trône pour les gouverner tous !

Game Of Thrones

L’hiver arrive ! C’est par ces mots qu’HBO annonçait le lancement au début de la décennie de sa nouvelle série « Game of Thrones ».

Développée par David Benioff et D. B. Weiss, celle-ci nous embarque dans un univers riche crée par l’auteur britannique à succès, George R. R. Martin : d’une part « Le Royaume des Sept Couronnes » sur le continent de Westeros et d’autre part celui d’Essos.

L’intrigue de « Game of Thrones » nous plonge au cœur d’une lutte sans merci pour l’accession au très convoité trône de fer. Entre enjeux politiques, guerres sanglantes et magies ancestrales, la série a su séduire un large public dès son lancement en avril 2011 pour devenir un phénomène mondial.   

Depuis son lancement, le show est devenu le fer de lance d’HBO, battant régulièrement des records, que ce soit en termes d’audiences ou de popularité sur les réseaux sociaux ; elle possède également le triste record de série la plus piratée de l’histoire. À chaque nouvelle saison, elle suscite l’engouement et attise les théories les plus folles auprès d’un large public.

Mais comment expliquer un tel succès ? Mérite-t-elle toute cette attention ou la série est-elle surcotée ? Analyse.

Synopsis :

Neuf familles nobles rivalisent pour le contrôle du Trône de Fer dans les sept royaumes de Westeros. Pendant ce temps, des anciennes créatures mythiques oubliées reviennent pour faire des ravages.

Au moment de scénariser « Game of Thrones » les show runners de la série ont déjà pu compter sur une base de travail exceptionnelle grâce aux écrits de George R. R. Martin et l’univers richissime qu’il a créé de toute pièce. À l’instar du grand Tolkien avec sa fameuse « Terre du milieu » qui abrite notamment les événements du « Seigneur des anneaux », l’auteur du « Trône de fer » a donné vie à un monde imaginaire d’une grande complexité.

Du nord du « Mur » jusqu’aux confins du continent d’Essos, le romancier britannique est à la base d’un vaste monde régit par ses propres codes dont il a formaté chaque aspect. Un univers aux multiples facettes, qu’il s’agisse des lieux, des divers peuples qui le compose (y compris leur propres langages) où de son histoire ancestrale, il n’a rien laissé au hasard pour façonner un monde vaste et cohérent.

Ne restait plus aux créateurs du show de transposer à l’écran le monde sorti de l’imaginaire de l’écrivain, ce qui était loin d’être chose aisée. Sur ce point, le pari est réussi et le travail effectué pour recréer cet univers si particulier fait plus que répondre aux attentes, les lieux importants comme Winterfell et Port-Réal, les deux principales cités de Westeros, ont été façonnées avec soins. Il en va de même pour les tenues des protagonistes et des clans qu’ils représentent, y compris leurs armoiries.

La série phare d’HBO nous offre des décors et des paysages à couper le souffle tandis que la mise en scène n’est pas en reste : la réalisation de « Game of Thrones » est en effet des plus soignée. Entre des scènes de combat épiques digne des plus grands films du genre (la dernière saison à venir nous promet d’ailleurs la plus grande scène de bataille jamais vue à l’écran) et celles plus intimiste concernant notamment la lutte pour le pouvoir, la mise en scène est toujours maîtrisée.

Il en va de même pour les effets spéciaux qui n’ont rien à envier aux grosses productions hollywoodiennes, qu’il s’agisse des créatures (dragons, marcheurs blancs, etc.), des maquillages, des costumes ou même du montage soigné entre certaines scènes, on sent que rien n’a été laissé au hasard, les équipes faisant parfois preuve d’ingéniosité (cf : des capes créées à partir de tapis IKEA).  

Évidemment, il est important de relativiser ces états de fait car si la mise en scène est parfaitement pensée, le budget dont a profité les show runners y est pour beaucoup. Avec un coût moyen de 10 millions de dollars par épisode, « Game of Thrones » fait partie du top 10 des séries les plus chères de l’histoire. Malgré tout, la pièce maîtresse d’HBO a su répondre aux attentes des fans avec brio et est une franche réussite techniquement parlant.

Une des forces de la série est sa richesse en termes d’intrigues et de sous-intrigues, les luttes pour le pouvoir entre chaque maisons prétendantes au trône et les tractations politiques qui en découlent sont très bien ficelées. Le scénario tient la route grâce à la qualité des dialogues, qui ne feraient pas tâche dans un épisode de « House of Cards ». Ceux-ci tiennent une place primordiale dans le déroulement des évènements et sont souvent très bien ficelés.

Néanmoins, cette richesse peut par moment être une faiblesse : toute ces intrigues qui s’entrecroisent sont parfois confuses pour le spectateur qui ne sait pas où donner de la tête. Il en va de même pour l’impressionnante palette de personnages qui compose la série. Mais une fois les deux premières saisons passées, la lecture des événements se simplifie, notamment par le nombre décroissant de protagonistes au fil des saison.

Les personnages justement, parlons-en, car il s’agit sans conteste du point fort de « Game of Thrones » au moment d’en faire l’analyse. La série introduit pléthore de héros haut en couleur, aux aspirations les plus variées. Mais c’est surtout la gestion de ces derniers et leur évolution qui est à souligner.

S’il n’est pas difficile de comprendre les motivations de chacun et leur position dans la série, pour certains la limite entre bien et mal est parfois confuse, ils ne restent pas figés pour autant. Chaque personnage est défini par les aventures qu’il vit, sorte de parcours initiatique qui va forger sa personnalité au fil des saisons (on pense notamment à Arya et Sansa).

Certains protagonistes qu’on aurait aisément rangé dans une case en particulier se révèlent finalement bien plus profonds, ils ne sont en aucun cas manichéens. Des personnalités qu’on prend un malin plaisir à détester au début du récit, finissent par se retrouver du bon côté de l’histoire ; tandis que d’autres qu’on pensait cruciaux ont fini par perdre du crédit ou tout bonnement disparaître, parfois de manière tragique de l’intrigue. Une des leçons à retenir de « Game of Thrones » est qu’il ne faut pas trop s’attacher aux personnages tant les rebondissements y sont légions.

Comme dans chaque séries ou films de cette ampleur, certains personnages sont bien plus charismatiques que d’autres, c’est le cas par exemple, avec Tyrion Lannister, campé par l’excellent Peter Dinklage, En dépit de sa faible posture, il s’est vite imposé comme le protagoniste le plus attachant de la série. Tyrion est si bien écrit qu’il est difficile de ne pas ressentir une certaine empathie pour sa personne.

Le soin apporté à l’écriture des personnages est remarquable, ils sont étoffés et ont tous un rôle à jouer dans l’histoire, même ceux esquissés en arrière-plan amènent leur pierre à l’édifice. Leurs interprètes les incarnent à merveille, c’est l’une des autres grandes forces de « Game of Thrones », son casting fait plus que tenir la route et forme un ensemble homogène d’acteurs confirmés et de jeunes talents prometteurs.

On retiendra particulièrement les prestations de Lena Headey, brillantissime dans son incarnation de la machiavélique Cersei Lannister, personnage au combien méprisé par les fans mais avec un potentiel dramatique incroyable ; celles d’Emilia Clarke et de Kit Harrington qui campent respectivement Daenerys Targaryen et Jon Snow qui se sont révélé comme des acteurs très populaires. Le reste est également de très bonne facture, on soulignera parmi tant d’autres la performance de Sean Bean, qu’on ne présente plus, dans la peau de Ned Stark, sans oublier celles de Nikolaj Coster-Waldau (Jamie Lannister), Sophie Turner (Sansa Stark), Maisie Williams (Arya Stark), Aidan Gillen (Petyr Baelish) ou encore Iwan Rheon (Ramsey Bolton).

En dépit de ses indéniables qualités, qui en font une des séries les plus appréciées et les mieux notées, « Game of Thrones » n’est pas exempte de tout reproche. Elle souffre notamment d’une certaine irrégularité, enchaînant des saisons de très bonnes factures et d’autres bien plus poussives. Si l’enchaînement des évènements s’intensifie au fil des saisons, le rythme de la série reste assez bancal. Heureusement pour elle, des épisodes qui semblent insipides peuvent parfois offrir un dénouement en apothéose grâce à des twists finaux que ne renierait pas M. Night Shyamalan (« Glass », « The Visit »).

Certains regretteront le choix des show runners de s’éloigner de plus en plus de l’œuvre de George R. R. Martin, allant jusqu’à proposer une fin différente de celle des ouvrages, qui n’ont d’ailleurs pas encore atteint leur terme. Si cette décision n’est pas préjudiciable, l’écriture des dernières saisons a offert son lot d’incohérences par l’usage récurrent de facilités scénaristiques et d’ellipses temporelles. Des éléments qui ont facilité le bon déroulement du récit mais qui ne gâchent en rien l’intérêt de la série, une fois passé outre.

Pour terminer sur une note positive, comment ne pas évoquer la superbe bande originale composée par Ramin Djawadi (à l’œuvre également sur la sublime série « Person Of Interest »). Le générique qu’il a composé est un petit bijou et souligne assez bien le genre de péripéties auxquelles nos héros sont confrontés, il participe grandement au succès de la série. Les différents thèmes qu’il signe accompagnent subtilement le récit, certains retiennent particulièrement notre attention comme « The King’s Arrival », « Winds of Winter », « Mhysa », « The North Remembers » ou encore le très exploité « Rains of Castamere ».

Au regard de ses innombrables qualités, le succès de « Game of Thrones » est tout sauf usurpé même si la série n’échappe pas à quelques gros défauts.

Qu’il s’agisse de la critique ou du public, tous ont été plus ou moins conquis par ce show aux multiples facettes. Grâce à une grande diversité d’intrigues, elle a réussi à rassembler un large public, parlant aussi bien aux amateurs de batailles épiques qu’aux spectateurs venus se divertir. Un programme qui favorise les dialogues complexes et qui ravi les fans de récits fantastiques, ce qui n’est pas une mince affaire.

S’il subsiste malgré tout quelques imperfections, celles-ci ne vampirisent en rien le niveau global de l’œuvre qui s’est affirmée comme un phénomène de la pop culture. À la question de savoir si elle mérite son succès, la réponse tend vers l’affirmative tant son engouement est planétaire et les nombreuses récompenses obtenues ne font que le confirmer.

« Game of Thrones » s’inscrit comme l’une des meilleures séries jamais produites et une série qui aura révolutionné la télévision, n’ayons pas peur de le dire. Ne reste plus qu’à espérer que le dénouement tant attendu sera à la hauteur des espérances et que la dernière saison à venir sera du même acabit que la globalité des saisons précédentes. Pour le savoir, rendez-vous à partir du 14 avril.

Note : 8/10

Damien Monami – Le 16 mars 2019

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