Les risques du métier ?
« Pas de vagues » est un film signé Teddy Lussi-Modeste qui s’inspire de son expérience face à la plainte pour harcèlement déposée par une adolescente lorsqu’il était prof de français dans un collège.
Nous prenons donc la plume pour donner notre avis.
Synopsis :
Julien (François Civil), jeune professeur de français, se trouve accusé de harcèlement par Leslie (Toscane Duquesne), une de ses élèves. Il tente de prouver son innocence mais fait face à des pressions multiples de la part du frère aîné de la jeune fille et des camarades de classe de la jeune fille. Cet incident tourne à l’incendie et embrase le collège, alors que Julien cherche du soutien auprès de ses collègues et de sa hiérarchie. Mais devant le risque d’embrasement, le silence règne dans l’école. Parallèlement, il cache son homosexualité à ses élèves et collègues, jusqu’à ce qu’une vidéo intime commence à circuler à l’école et révèle son secret, ce qui finit par amplifier la spirale de violence dont il est la victime.
Un sujet délicat qui en rappelle un autre, « Les risques du métier » remarquable adaptation du roman de Simone et Jean Cornec, où le spectateur participe au calvaire de Jean Doucet, l’instituteur d’un petit village, incarné par Jacques Brel, accusé de pédophilie par plusieurs de ses élèves ! Un film d’André Cayatte (1967) parfaitement maîtrisé qui voit les habitants de ce village normand sacraliser la parole de l’enfant et préférer lyncher leur instituteur plutôt que de le présumer innocent…
Dans « Pas de vagues », le cinéaste Teddy Lussi-Modeste (« Le prix du succès » en 2017), coauteur du scénario avec Audrey Diwan (Lion d’or 2021 pour « L’évènement ») s’est inspiré de sa propre et difficile expérience pour nous montrer le désarroi d’un simple professeur dont l’idéalisme (un brin naïf) se heurte aux maux de notre société moderne.
Sous nos yeux éberlués l’engrenage se met en place et la mécanique de la rumeur prend le pas sur la raison. François Civil incarne une fois encore avec subtilité et une certaine fragilité un personnage en proie à un véritable cauchemar éveillé.
La tension monte lentement mais inéluctablement grâce aussi à un ensemble de jeunes élèves (bien castés) qui se révèlent tous plus flippants les uns que les autres.
C’est cet effet de groupe, de meute qui nous permet de mesurer la faiblesse du professeur et du corps enseignant dans son ensemble face au sentiment d’abandon de la direction et de l’institution.
Un film à voir absolument pour mesurer combien l’art d’enseigner dans la France d’aujourd’hui peut devenir un calvaire quand un petit grain de sable peut broyer les rêves d’un professeur idéaliste.
Presqu’un cas d’école !
Le film démontre combien un professeur, à fortiori un idéaliste, peut très involontairement se retrouver sur une corde raide face à l’agressivité et la malveillance de certains élèves.
Quant au manque criant de solidarité des directeurs ou des principaux de collège plus soucieux de ne pas faire de vagues et (ou) de protéger leur carrière (un phénomène assez français car d’autres pays ne confient pas les directions d’établissement de la même manière) !
François Civil sait choisir ses rôles et arrive très vite à faire oublier D’Artagnan.
Yves Legrand – Le 16 avril 2024
Sources Photos :
© 2024 Cinéart – https://www.cineart.be/fr/presse/pas-de-vagues
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