Un trou béant
Après « Délivre-nous du mal », « Doctor Strange » et « Black Phone », Scott Derrickson revient avec « The Gorge », un thriller au concept intrigant : deux snipers d’élite, interprétés par Miles Teller et Anya Taylor-Joy, sont chargés de surveiller un mystérieux trou brumeux.
Ce postulat énigmatique suffira-t-il à créer une atmosphère angoissante digne du réalisateur ? On plonge pour le savoir !
Synopsis :
Deux agents surentraînés sont affectés à des postes de garde dans des tours situées des deux côtés d’un vaste gouffre secret, afin de protéger le monde du mal mystérieux qu’il renferme. Nouant des liens malgré la distance, les deux agents doivent rester vigilants face à cet ennemi invisible. Mais lorsque la menace cataclysmique pour l’humanité leur est révélée, ils devront faire équipe pour maintenir le secret à l’intérieur du gouffre avant qu’il ne soit trop tard.
Scott Derrickson a déjà prouvé sa capacité à instaurer la peur avec peu de moyens, notamment avec « L’Exorcisme d’Emily Rose » et « Sinister », deux références du genre. Malheureusement, « The Gorge » semble plutôt renouer avec les travers de « Délivre-nous du mal », en dilapidant son potentiel initial. L’idée d’une fosse énigmatique, nécessitant la vigilance constante de deux tireurs d’élite, l’un américain et l’autre agent des services secrets russes, aurait pu déboucher sur un huis clos haletant. Pourtant au lieu d’explorer ce mystère, Derrickson opte pour une romance laborieuse.
Passée une introduction prometteuse, le film bascule rapidement dans une intrigue sentimentale façon « Vous avez un message » avec Tom Hanks et Meg Ryan. Pendant plus d’une heure, « The Gorge » s’enlise dans les échanges mièvres entre ses protagonistes, diluant toute tension et mettant de côté l’atmosphère oppressante qu’il aurait pu exploiter.
Lorsqu’il se décide enfin à s’intéresser à l’univers brumeux de « The Gorge », le film évoque des influences variées : le trouble métaphysique d’« Annihilation » (sans l’impact visuel), des créatures rappelant le « King Kong » de Peter Jackson, le bestiaire étrange de « The Green Knight » et même les Marcheurs Blancs de « Game of Thrones ». Un cocktail intéressant sur le papier, mais qui peine à convaincre à l’écran.
Le scénario de Zack Dean (« Fast X », « The Tomorrow War ») accumule les emprunts sans jamais trouver sa propre identité. On pense même à « Commando Épouvante » (la centième aventure de Bob Morane signée Henri Vernes), mais ici, la sauce ne prend pas. Le problème majeur réside dans cette romance forcée et ses dialogues creux, qui viennent parasiter un concept pourtant prometteur.
Si quelques effets visuels sortent du lot (comme le passage visqueux près du missile), la mise en scène de Derrickson manque cruellement d’inspiration. Le film échoue à tirer parti de son décor et de ses effets spéciaux pour créer un véritable climat d’angoisse.
Même Sigourney Weaver, pourtant créditée au casting, semble sous-exploitée, son passage étant aussi anecdotique que décevant – bien loin de l’impact qu’elle avait dans « La Cabane dans les bois ».
« The Gorge » est une déception, malgré un concept initial intrigant. Plutôt qu’un thriller horrifique haletant, Scott Derrickson livre une romance insipide, incapable de captiver ou de provoquer la moindre émotion.
Un film qui se regarde de façon désintéressée un dimanche pluvieux, mais qui ne laissera aucune trace marquante dans le genre.
Julien Legrand – le 9 mars 2025.
Sources Photos :
© 2025 Apple TV
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