
Critique « The Gorge » (2025) : Un trou béant
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Dylan in the Wind
Vingt ans après avoir accouché de l’un des biopics parmi les plus réussis encore à ce jour avec « Walk The Line », centré sur Johnny Cash, le génial James Mangold s’attaque à une autre légende de la musique contemporaine, un certain Robert Zimmerman, mieux connu sous le nom de Bob Dylan.
Certains diront qu’on à fait le tour de la question avec les biopics musicaux, qu’ils se ressemblent tous… toujours est-il que le genre continue d’attirer le public dans les salles, alors pourquoi s’en priver ? D’autant qu’avec Mangold aux commandes, il y a de quoi rassurer les plus sceptiques.
Pour incarner cette légende vivante, le choix s’est porté sur un acteur en vogue en la personne de Timothée Chalamet. La star de « Dune » est accompagnée d’un beau casting d’ensemble avec notamment le brillant Edward Norton ou la talentueuse Elle Fanning.
« A Complete Unknown » (en VO) à des atouts à faire valoir, reste à les confirmer. Verdict…
Synopsis :
New York, 1961. Alors que la scène musicale est en pleine effervescence et que la société est en proie à des bouleversements culturels, un énigmatique jeune homme de 19 ans débarque du Minnesota avec sa guitare et son talent hors normes qui changeront à jamais le cours de la musique américaine. Durant son ascension fulgurante, il noue d’intimes relations avec des musiciens légendaires de Greenwich Village, avec en point d’orgue une performance révolutionnaire et controversée qui créera une onde de choc dans le monde entier…
Si le biopic musical est un genre assez populaire, il cristallise aussi bon nombre de critiques, on leur reproche d’être trop linéaires, trop policés. Ces dernières années, surfant sur l’immense succès de « Bohemian Rhapsody », beaucoup d’artistes y ont eu droit : Elton John, Elvis Presley, Aretha Franklin ou plus récemment Bob Marley et Amy Winehouse, pour des fortunes diverses, certains ressemblant davantage à une page Wikipédia qu’à un récit captivant sur grand écran.
Là était tout le défi pour Mangold, dans la profusion actuelle de biopics, il était important de se démarquer et de proposer une œuvre non-consensuelle, comme il l’avait déjà fait avec « Logan » en proposant sa vision du film de super-héros tout en respectant certains codes du genre. Même si on est loin de l’exercice de style façon « I’m not there » de Todd Haynes (2007) dont chacune des facettes de Dylan étaient incarnées par un acteur différent, « Un parfait inconnu » parvient néanmoins à tirer son épingle du jeu grâce à quelques choix judicieux.
D’abord en se focalisant uniquement sur une brève partie de la vie du chanteur, à savoir son ascension comme icône folk jusqu’à son passage fracassant à l’électrique, ressenti comme une trahison par une partie de ses fans de la première heure. Cela permet de mettre en perspective toute l’audace d’un artiste de génie qui ne se contente pas de faire de la musique pour répondre aux attentes mais qui est prêt à prendre des risques, à explorer d’autres styles, quitte à “trahir” son public pour ne pas se trahir lui-même.
Toute la contrainte de réaliser un film sur Bob Dylan est que ce dernier a toujours su laisser planer un certain mystère autour de sa personne. Les quatre années sur lesquelles le film s’attarde permettent, d’une part, de conserver le doute sur son passé, et d’autre part de s’attarder davantage sur sa musique et sur son évolution en fonction des rencontres qui ont influencé sa manière d’aborder son art. Contrairement à la plupart des biopics, « Un parfait inconnu » ne se contente pas d’un enchevêtrement d’extraits musicaux à un rythme effréné, il donne à chaque morceau le temps de s’exprimer pleinement – certains sont interprétés dans leur intégralité. Le récit prend le temps de nous plonger dans le processus créatif et dans la façon d’aborder l’écriture d’un artiste qui ne cesse de se réinventer.
Pour incarner une telle icône, il ne fallait pas se tromper sur le choix de l’acteur et celui de Timothée Chalamet s’impose comme une évidence tant sur le plan physique que symbolique. La ressemblance est assez frappante entre les deux. Mais bien qu’il soit doté, comme son aîné, d’une morphologie élancée, le jeune acteur a étudié la gestuelle du chanteur pour capter l’esprit qui était le sien à cette période de sa vie. Il adopte sans complexe l’allure dégingandée, les épaules voûtées et l’air faussement timide du jeune Dylan et prend de l’envergure au fil du récit comme celui-ci. Il faut dire que Chalamet – que l’on a découvert il y a déjà une décennie dans « Interstellar » – connaît les affres de la célébrité naissante, lui qui comme son personnage est devenu l’icône d’une génération et renvoie une image qui ne plaît pas forcément à tout le monde.
La musique, dans son ensemble, est un véritable point fort du film. Comme l’ensemble du casting, Chalamet donne de sa personne pour assurer lui-même les parties chantées et instrumentales. Sa voix est loin d’être parfaite mais il ressort de son interprétation une authenticité bienvenue.
Outre son acteur principal, « Un parfait inconnu » peut compter sur une distribution d’ensemble de grande qualité, on sent que rien n’a été laissé au hasard par les acteurs pour coller à leur personnage, peu importe leur temps à l’écran – à l’image de Boyd Holbrook dont la présence, bien que minime en Johnny Cash, marque considérablement les esprits. Elle Fanning est quant à elle déchirante dans le rôle de Sylvie Russo – la petite amie de Dylan – tout comme la révélation Monica Barbaro, qui se révèle aussi captivante que la vraie Joan Baez.
Enfin, on ne présente plus Edward Norton, l’acteur de « Fight Club » et « American History X » est brillant sous les traits de Pete Seeger. Mentor du jeune Dylan, il finit par renier son poulain lorsque ce dernier décide de s’éloigner de ses racines folk, dans une scène géniale où sa fureur à peine contenue – cachée derrière sa voix douce et amicale et son attitude souriante – nous rappelle tout son talent pour incarner des âmes complexes.
« Un parfait inconnu », sans être parfait justement – et c’est peut-être là sa principale qualité – s’inscrit parmi les bons exemples de biopic réussi. Il brosse un portrait assez juste de ce qu’est Bob Dylan, un artiste de génie, musicien touche à tout, capable de se réinventer doublé d’une personnalité complexe et insaisissable.
Certains excès sont certes trop peu développés, cependant le film réussit à dépeindre l’impact qu’a eu cet artiste, devenu figure de proue de la musique folk et de sa communauté tout en refusant de se soumettre aux attentes de celle-ci pour tracer sa propre route, brisant du même coup les murs trop épais entre les genres.
Autre élément qui peut sembler anodin mais qui apporte une vraie plus-value : l’importance accordée au texte – la plupart des morceaux sont accompagnés de sous-titre – car l’interprète de « Blowind in the Wind » retranscrit à merveille ce qu’ont pu ressentir les acteurs, lui y compris, de cette époque. Mais c’est aussi à travers ses mots que le scénariste donne du sens au récit et à son évolution dans celui-ci.
« Un parfait inconnu » s’avère un solide biopic même si certains regretteront que l’on n’en apprenne pas plus sur le passé du chanteur – Dylan lui-même a toujours entretenu un certain flou autour de sa personne. James Mangold a su éviter le piège de la biographie stricto-sensu en se focalisant uniquement sur l’ascension du lauréat 2016 du Nobel de littérature jusqu’au point de bascule qui l’a conduit au statut de légende.
Loin d’être un simple récit biographique, c’est avant tout l’évocation d’une époque marquée par une profusion de talents et une prise de conscience collective d’une jeunesse prête à changer les choses dans un monde en crise. Le film de James Mangold accorde une attention toute particulière au contexte d’une époque à la fois révolue et d’une étrange résonance avec ce que l’on connaît actuellement. Tous les talents convoqués se mettent au diapason pour rendre crédible cette reconstitution, autant sur le plan physique qu’idéologique. Chacun semble avoir capté l’esprit de l’époque et maîtriser leur sujet.
Plus qu’un film sur Bob Dylan, « Un parfait inconnu » est l’évocation d’une époque finalement pas si différente d’aujourd’hui.
Damien Monami – le 19 mars 2025.
Sources Photos :
© 2024 Searchlight Pictures
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