Critique « The Dark Knight » (2008) : Sombre Reflet.
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red dead redemption
S’il y a bien un genre qui sied à merveille au cinéma américain, c’est bien le western, tant il est représentatif de la culture et de l’histoire de ce vaste pays. Il faut dire que les américains se retrouvent beaucoup dans les thématiques propres à ce cinéma comme la rédemption, la justice, la notion de bien et de mal (souvent l’élément central), le racisme (entre blanc et peaux rouges) et la soif de liberté.. Bien que la période dont ces récits s’inspirent remonte à plus d’un siècle, ces questionnements ne sont pas révolus pour autant (le rapport aux armes, la diversité ethnique et culturelle, etc.).
Si l’âge d’or de ce genre, qui s’étend des années 1920 à la fin des années 1950, est depuis longtemps révolu, le western reste très ancré dans l’esprit collectif grâce à ses œuvres les plus mythiques, la plupart étant paradoxalement apparues après cette époque ; on pense à « Rio Bravo » avec John Wayne, aux films de John Ford (« La Chevauchée fantastique », etc.) ou de Sergio Leone (« Il était une fois dans l’Ouest », « Le bon, la brute et le truand », etc.), à « Pale Rider », « Mon nom est personne », « Danse avec les loups » ou encore « Impitoyable ».
Le genre s’est quelque peu essoufflé par la suite, laissant la place aux films de super-héros qui soulèvent le même genre de thématiques avec plus de modernité. S’il subsiste encore des westerns de bonne facture (« True Grit » des frères Coen, « Django Unchained » et « Les 8 Salopards » de Quentin Tarantino), ils sortent souvent du cadre du western par leur forme moins consensuelle. Avec « Hostiles », le réalisateur Scott Cooper nous embarque dans un western dans sa plus pure tradition tout en y apportant une touche de modernité.
En 1892, le légendaire capitaine de l’armée américaine Joseph Blocker(Christian Bale) accepte à contrecœur d’escorter un chef de guerre Cheyenne (Wes Studi) et sa famille, désireux de retrouver ses terres ancestrales pour y mourir. Sur le chemin, qui va les emmener du Nouveau Mexique au Montana, ils font la rencontre de Rosalie Quaid (Rosamund Pike), dont la famille a été assassinée par une tribu de Comanche. Ensemble, ils vont devoir faire preuve de solidarité pour survivre à un environnement des plus hostile.
Ici, point de manichéisme malgré des antagonismes profonds entre les deux clans dont les destins sont désormais liés. Contrairement aux stéréotypes, les Indiens ne sont pas dépeints comme des autochtones sanguinaires et les Colons ne sont pas toujours vus comme les bons samaritains : chaque clan ayant sa part d’ombres et sa part d’humanité.
Comme c’est le cas dans ses précédents long-métrages, que ce soit « Strictly Criminal » ou « Les Brasiers de la Colère », Scott Cooper cherche à esquisser l’esprit américain dans ce qu’il a de plus profond sans pour autant glorifier qui que ce soit. Avec « Hostiles » il s’attarde sur les conflits du passé, notamment celui qui a opposé les colons aux Indiens ou la guerre fratricide entre Cheyennes et Comanches, et sur les conséquences qui en découlent.
Tout l’enjeu du film réside dans la notion de rédemption, les barrières entre deux clans que tout oppose disparaissent lorsque la solidarité s’impose. Les scènes que se partagent Christian Bale et Wes Studi sont d’une profonde intensité et ne sont pas étrangères à la qualité de ce western dans lequel les différences, empreintes d’animosité finissent par les rassembler autour d’une cause commune.
Loin des transformations corporelles dont il est coutumier, Christian Bale, qui renoue avec le western après « 3h10 pour Yuma » sorti en 2007, livre une prestation d’une grande intensité avec un côté taciturne qu’il maîtrise à la perfection, bien que ses émotions soient intériorisées, il parvient à les transmettre sans aucune difficulté. Dans un autre registre, Rosamund Pike n’a rien à envier à son partenaire, elle incarne à merveille cette femme, traumatisée par le massacre de sa famille devant ses yeux, qui tente de se reconstruire tant bien que mal, elle nous fait ressentir toute la douleur psychologique qui résulte de ce drame. Elle démontre une nouvelle fois tout son talent déjà aperçu dans « Gone Girl » et prouve qu’elle est capable de jouer des rôles variés.
Qui dit western, dit grands espaces et le film de Scott Cooper ne déroge pas à la règle, outre l’immensité des paysages, il nous offre des plans tout en contraste, passant allègrement de régions désertiques bercées d’une éblouissante clarté à des contrées montagneuses qui s’enfoncent dans la pénombre, ces larges panoramas succèdent parfois à des gros plans plus minimalistes. L’opposition des tableaux fait directement référence à celle des hommes. La musique, composée par Max Richter, souligne parfaitement le côté contemplatif de l’œuvre.
Néanmoins, un des principaux défauts d’« Hostiles » découle de ces paysages, on a parfois l’impression que le réalisateur s’égare dans la contemplation de ces derniers, certaines de ces scènes traînent en longueur. Le film souffre par ailleurs d’une autre imperfection qui, bien que minime, mérite qu’on s’y attarde : certains protagonistes auraient mérité d’être approfondis, notamment celui incarné par Ben Foster, érigé en monstre ultime pour des crimes que de nombreux autres soldats ont également commis et qui représente la haine raciale profondément ancrée chez de nombreux Américains de « race » blanche.
Pour terminer sur une note positive, il est important de souligner le travail effectué en amont pour représenter les peuples amérindiens le plus fidèlement possible. Au-delà de leur tradition, un soin particulier a été apporté au dialogue en langue Cheyenne et Comanche : les acteurs ayantappris ces dialectes afin de coller au mieux à la réalité.
Avec « Hostiles », qui n’est pas sans rappeler le bijou de John Ford « La Prisonnière du Désert », Scott Cooper signe enfin son film référence. Il livre un western dans la plus pure tradition du genre tout en y ajoutant une touche de modernité. Les questionnements qu’il soulève sont d’une grande profondeur et trouvent un écho dans l’Amérique actuelle. On ne peut qu’être admiratif devant le travail de reconstitution de l’époque tant au niveau des paysages, qui sont d’une rare beauté, qu’au niveau de la psychologie des personnages.
Christian Bale et Rosamund Pike sont fidèles à eux-mêmes avec des interprétations qui prouvent encore une fois l’étendue de leur grand talent. Avec les thèmes de la rédemption, du deuil et de la tolérance, « Hostiles » prouve que le western n’est pas désuet et qu’il a encore de beau jour devant lui.
Note: 8,5/10
Damien Monami – 30 mars 2018
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